BAMAKO, VILLE ARABE
L’arabité fait partie du patrimoine de la capitale malienne
L’islam a vite pénétré le bled-es-soudan (littéralement le pays des Noirs. Ainsi était appelaient les négociants et autres explorateurs venant du lointain Orient le pays aujourd’hui nommé République, vaste territoire d’Afrique de l’ouest qui s’étend sur plus de 1,2 million kilomètres carrés, partageant des centaines de kilomètres avec sept autres pays (Algérie, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée Conakry, Mauritanie, Niger et Sénégal). Pays continental, il est situé en plein Sahel, il est tributaire des ports maritimes des pays frontaliers (Guinée Conakry, Côte d’Ivoire et Sénégal notamment), et même de ceux d’autres pays de l’ouest africain comme le port de Lomé (Togo) et celui de Takoradi (Ghana) qui lui permette une intense activité de par le dynamisme de ses opérateurs économiques.
Bamako, la capitale du Mali, est une ville cosmopolite où l’on retrouve l’ensemble des populations maliennes. Mais la ville a comme dans ses gènes une part importante d’arabité qui s’explique sans doute par les relations millénaires tissées entre le pays et le monde arabe. Le commerce transsaharien, les voyages exploratoires et les pérégrinations aux fins d’études ont conduit des Arabes à s’aventurer jusqu’en Afrique et quelque chose de significatif semble les avoir attirés particulièrement vers le Soudan (actuel Mali) ; les historiens ont encore des efforts à fournir pour éclairer ces relations. Ce qui est certain, l’existence de grandes villes musulmanes au Mali, elles Tombouctou, Gao, Djenné, Dia, etc., témoigne des rapports suivis. L’enlèvement par le Sultan Mansour du Maroc (qui n’a pourtant pas de frontières immédiates avec le Mali) du savant Ahmed Baba de Tombouctou en raison justement de sa vaste érudition dans les sciences islamiques est un épisode significatif dans l’histoire. Ahmed Baba restera seize (16) en captivité avant de pouvoir revenir chez lui. Or, le même Ahmed Baba atteste dans ses écrits qu’en l’an 60 de l’hégire, il existait déjà douze (12) mosquées dans le territoire du vieux Mali, ce qui explique les relations anciennes entre le bled-es-Soudan (le pays des noirs, Mali d’aujourd’hui) et les pays arabo-musulmans qui ont forcément entendu parler de ce territoire et qui l’ont même découvert d’une manière ou d’une autre, soit par le biais du commerce, soit par des expéditions exploratrices. Les récits du célèbre voyageur arabe magrébin, Ibn Batouta, ont par ailleurs contribué grandement à faire connaître le Mali ancien. Un fait notoire retient l’attention. En effet, il y a de vieux quartiers de Bamako, capitale du Mali, qui portent curieusement les noms de pays ou villes arabes. On peut citer Bagadadji (déformation vernaculaire de Bagdad (capitale de l’Irak), ce qui indique que le lieu avait été jadis investi par des commerçants arabes venus du lointain Irak. Leurs traces indélébiles sont incontestablement les habitants autochtones du quartier qu’on appelle les « Souraka », c’est-à-dire populations d’origine arabe. A quelques centaines de mètres près, il y a le quartier de Missira, nom dérivé de Misr, appellation ancienne de l’Egypte, de surcroît tiré du saint Coran. Or, Bagadadji et Missira font partie des plus anciens quartiers de Bamako. On peut citer le quartier de Médine situé à l’ouest de Missira (Médine est tout simplement la prononciation africaine de Al-Madina, ville en arabe). Autant dire que l’arabité fait partie du patrimoine culturel et sociologique de la capitale malienne.
De Bamako, correspondance particulière de Amadou Diallo