À TRAVERS LE TEMPS, HATRA, "PAYS DU SOLEIL", CAPITALE DU PREMIER ROYAUME ARABE
Située à 27 kilomètres à l'ouest de l'autoroute reliant Bagdad à Mossoul, l'ancienne ville de Hatra est un maillon de la chaîne des villes arabes illustres, telles que Palmyre en Syrie, Pétra en Jordanie et Baalbeck au Liban. C'est aussi la seule ville irakienne ancienne où l'on peut trouver de "véritables" ruines, c'est-à-dire des vestiges archéologiques visibles que tout le monde, même sans être un initié, peut admirer. En effet, la civilisation irakienne, essentiellement une "civilisation d'argile", présente peu de vestiges archéologiques au visiteur profane.
En 612 avant J.-C., au lendemain de la chute de l'Empire assyrien, certaines tribus arabes émigrèrent de l'ouest et du sud-ouest de l'Irak vers le nord et vinrent s'établir à Hatra (110 km au sud-ouest de Mossoul) pour y fonder le premier royaume arabe. Hatra, "pays du soleil", devint leur capitale. De petit village insignifiant, Hatra changea radicalement d'aspect et devint une ville dotée d'une architecture, d'une sculpture, d'une production de métaux et d'un art guerrier qui n'avaient rien à envier à l'illustre Rome.
La ville fut d'abord connue sous le nom d'Arabaya, soit "le pays des Arabes", en raison de la densité élevée de la population d'origine arabe qu'elle contenait. À l'instar des autres cités de l'époque, le plan de Hatra est circulaire. À l'origine, la ville était entourée d'un rempart extérieur de trois mètres d'épaisseur et de huit mètres de longueur, renforcé par 163 tours. Cinq cents mètres plus loin, une muraille de terre de six kilomètres de long s'élevait, bordant un fossé destiné à la défense de la ville. Quatre portes massives, situées aux quatre points cardinaux, la perçaient. Deux gigantesques tours gardaient l'entrée principale de la ville.
Quant au style architectural, il est d'une extrême richesse : on est frappé par la cohabitation des styles hellénistique et oriental dans cette partie du monde. La présence de colonnades à profusion, d'iwans et de voûtes, d'une part, et la richesse statuaire, qu'aucune autre ville irakienne ne possède, d'autre part, témoignent du mariage heureux entre ces deux styles. En effet, Hatra est une véritable forêt de statues : dieux, rois, combattants, commerçants, prêtres, ministres ou simples habitants sont tous représentés par des sculptures qui ornent chaque coin de la ville.
Hatra, ville des dieux et des temples
En arrivant à Hatra, c'est le grand temple dédié au Dieu Soleil que l'on remarque en premier, du fait de sa stature. Sa façade se situe à l'est pour accueillir les premiers rayons du soleil dès leur naissance. Le soleil a toujours été le compagnon des Arabes dans leurs déplacements. Aussi, dès la fondation de leur premier royaume, ont-ils construit cet imposant édifice. Curieusement, même la ville de Hatra est ronde comme le soleil et s'est étendue progressivement, tels des rayons du soleil.
Outre le Dieu Soleil, les Arabes de l'époque vénéraient d'autres divinités : la déesse Shahira, l'étoile du matin "Vénus", et Nergoul (Nergal pour les Sumériens et les Babyloniens), symbolisé par la planète Mars. Les habitants de Hatra adoraient aussi l'aigle, qui revient souvent en tant qu'élément décoratif dans leur architecture. Ce rapace était l'attribut principal de la religion de Hatra.
Hatra dans l'histoire
En ce qui concerne l'histoire de la ville, seules les inscriptions découvertes sur le site, en araméen, en latin et en grec, peuvent nous éclairer. Ainsi, l'histoire de Hatra serait divisée en trois périodes : la période de la genèse, celle des Seigneurs et celle de la monarchie. Nous possédons très peu d'indices sur la première période. Au cours de la période des Seigneurs, qui est relativement mieux connue que la précédente, la ville connut un essor sans pareil et devint toute-puissante.
L'histoire de Hatra est jalonnée de guerres contre les Romains, lesquels connurent principalement deux cuisantes défaites : l'échec du siège mené par Trajan devant Hatra en 177 et celui de Septime Sévère en 198. Ces débâcles romaines établirent la réputation militaire et guerrière de la ville ainsi que l'héroïsme de ses habitants. Hatra était réputée pour ses archers et l'emploi des « feux hatréens » (des flèches trempées dans du bitume et enflammées), qui avaient des effets dévastateurs sur les machines de guerre de l'ennemi.